Le nom de Françoise Nyssen, éphémère ministre de la culture au conformisme idéologique affligeant, sera depuis longtemps dans la poubelle mémorielle de l’histoire que nul historien rigoureux de la politique ou des lettres ne pourra occulter le rôle éminent de Charles Maurras au long de la première moitié du XXe siècle et son influence par la suite.

Laissant Nyssen dans son déshonneur sectaire d’avoir fait exclure les pages à la mémoire du grand homme, académicien, écrivain, poète, et félibre, outre longtemps son rôle d’influence sur la politique, l’historien juif Pierre Nora, peu suspect de nostalgie royaliste ou vichyste, s’est grandi en évoquant dans de pertinents articles dans Le Figaro quotidien ou hebdomadaire combien on ne pouvait résumer la personnalité, l’œuvre et l’action de Charles Maurras à ses positions dans les débats de son époque.

Alain Sanders a remarquablement renforcé cette juste réflexion en nous offrant non pas tant un nouveau livre sur Maurras que l’évocation d’un autre Maurras, un Maurras en effet trop souvent occulté et quelquefois par certains soi-disant maurrassiens.

Un Maurras qui fut prophète en dénonçant dans les années 30 la menace grandissante allemande et nazie et demandant inlassablement de renforcer notre armée pour se prémunir d’une défaite atroce, un Maurras ensuite tout sauf « collabo », prônant ce qu’il pensait être, à tort ou à raison, les meilleures façons de résister, un Maurras d’ailleurs honni des collabos rêvant d’une grande Europe sous la houlette nazie.

Parmi bien des textes de Maurras trop peu connus, qu’il reproduit dans son livre, Sanders a ainsi notamment choisi une cinglante réponse à Marcel Déat, ancien dirigeant socialiste, un des deux grands chefs de la collaboration (l’autre étant Doriot, ancien n° 2 du parti communiste). Cet article, qui aurait dû paraître dans l’Action Française, fut totalement censuré.

En une quinzaine de textes ou d’anecdotes judicieusement choisis, Sanders livre ainsi une batterie de réplique aux mensonges de la haineuse désinformation idéologique sur le cas emblématique de Maurras. La question n’est pas tant aujourd’hui d’en défendre ou désapprouver toutes les positions politiques conjoncturelles avec tous les dangers de l’anachronisme, le péché impardonnable en histoire.

La question est tout simplement celle de la vérité sur un homme dont la pensée, les analyses, le style et les œuvres suscitèrent l’admiration et souvent l’adhésion d’un grand nombre parmi les plus talentueux écrivains de son temps, mais aussi la culture et la réflexion politique, de grands personnages. Contentons-nous de citer ici un Georges Pompidou.

Bernard Antony