C’est un très instructif et très émouvant ouvrage que, sous le titre Le sacrifice du soir, Jean de Viguerie a consacré à Madame Elisabeth, sœur de Louis XVI.
Pour dire l’originalité de son livre par rapport aux autres biographies de cette princesse martyre, il écrit, avec modestie, qu’il s’agit « d’un travail d’universitaire ». Cela est vrai bien sûr car ce livre n’est pas une histoire romancée écrite au fil de la plume à partir de quelques traits sélectionnés, mais un travail d’historien scientifique avec toutes les précisions et références sur ses sources ; une précieuse bibliographie pour qui voudrait lire encore sur Madame Elisabeth et son temps, un index des noms toujours utile lorsque longtemps après la lecture on recherche quelque extrait sur un personnage cité.
Mais ce livre est évidemment bien plus qu’un travail d’universitaire. Car, dans sa grande clarté d’expression, Viguerie, toujours tout de mesure et de retenue classique, exprime sans détour non seulement sa grande admiration pour Madame Elisabeth mais sa totale sympathie pour sa lucidité, sa détermination, son courage, et même sa dévotion pour sa sainteté.
Et aussi ce regret qu’expriment tous ceux qui, comme moi, jugent que la Révolution non seulement a été sanguinaire, abominable, génocidaire, mais aussi accoucheuse des grands totalitarismes modernes : « Ah que n’a-t-elle été à la place de son frère ! » Et en effet Madame Elisabeth elle-même, nous dit Viguerie, a commencé à deux reprises une correspondance par ces mots : « Si j’étais Roi ».
Elle écrivait encore : « Il fallait affronter les dangers. Nous en serions sorti vainqueurs.»
Ces mots en disent long sur la tragédie française d’une révolution qui, face à un Roi plus résolu, n’aurait sans doute pas abouti. Hélas, Madame Elisabeth ne pouvait, ni d’ailleurs ne voulait, être le Roi, c’est-à-dire essayer de devenir l’instigatrice de ses décisions. Trop désireuse pour cela de simplement demeurer à sa place, dans son rôle. Mais elle ne se prive pas d’encourager les contre-révolutionnaires.
Jean de Viguerie brosse ensuite, avec une superbe sobriété d’émotion affleurante mais contenue, le chemin vers l’échafaud de la Princesse. C’est aussi une marche vers la sainteté. Il y a là la trame de ce qui pourrait être le sujet d’un grand film, s’il y avait encore un cinéma français avec des metteurs en scène à la hauteur du Bernanos et du Bruckberger du Dialogue des carmélites. Mais il ne faut désespérer de rien. Il faut lire la prière récitée par Madame Elisabeth à la prison du Temple.
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